La cigarette électronique connaît un grand succès : on estime à un million le nombre d’utilisateurs en France.
Présentée par ceux qui les vendent comme une excellente solution pour arrêter de fumer ou pour fumer sans danger, qu’en est-il vraiment ?
Nos réponses à vos questions, avec l’aide de spécialistes !
Qu’est-ce que la cigarette électronique ?
Composée d’une batterie, d’un interrupteur automatique ou manuel, d’un atomiseur (élément chauffant qui contient la résistance) qui produit de la vapeur à partir de cartouches contenant du liquide à base de propylène glycol et/ou de glycérol, des arômes, et souvent de la nicotine la cigarette électronique (ou e-cigarette) ressemble à une vraie cigarette (ou à un cigare ou bien encore à une pipe).
Elle simule l’acte de fumer grâce à la production de vapeur inhalée par l’utilisateur mais sans tabac, sans combustion et sans « vraie » fumée.
Certains modèles de cigarettes électroniques ont même une diode électro luminescente qui s’allume lorsque l’utilisateur de cigarette électronique « fume » celle-ci.
En inspirant, le consommateur active l’atomiseur qui mélange le liquide avec l’air inspiré. Ce mélange est alors inspiré et inhalé sous forme de vapeur. Un nuage de vapeur est rejeté au moment de l’expiration.
La cigarette électronique est-elle sans danger ?
On manque de recul et d’études pour affirmer que la e-cigarette est sans danger. Des médecins et des scientifiques ont soulevé plusieurs points qui pourraient avoir un impact sur la santé.
Tout d’abord, les consommateurs de cigarettes électroniques - appelés « vapoteurs »- doivent inhaler plus fortement avec une cigarette électronique qu’avec une cigarette pour obtenir une bouffée satisfaisante.
Certains chercheurs se demandent donc quel est l’effet à long terme de ces inhalations fortes et souvent répétées : n’y a-t-il pas un risque?
En outre, on ne sait pas quelles sont les conséquences à long terme de l’inhalation répétée et sur une longue période de glycérol et de propylène glycol, les e-liquides contenus dans la cartouche.
Autre problème, la très grande disparité des produits disponibles et le manque de contrôle sur la qualité : des études ont montré que des cigarettes électroniques sensées ne pas contenir de nicotine en contenaient quand même à doses infimes. Idem pour d’autres substances.
« Mais, même si des incertitudes persistent, en attente d’études complémentaires, sur une totale innocuité de la vapeur des e-cigarettes, les risques sont très certainement moindres en comparaison de la toxicité majeure de la fumée de tabac ( plus de 4 500 produits chimiques, sous forme gazeuse et particulaire, dont le monoxyde de carbone ( totalement absent des e-cigarettes ) et plus d’une cinquantaine de cancérogènes » souligne le Dr Béatrice Le Maître, tabacologue au CHU de Caen, Secrétaire générale adjointe d’Alliance Contre le Tabac).
Des analyses réalisées par différents laboratoires ont en effet montré que l’on trouvait seulement des traces des substances cancérigènes dont l’association est spécifique au tabac dans les e-cigarettes.
La e-cigarette, une aide au sevrage tabagique ?
La cigarette électronique ne fait pas aujourd’hui partie des moyens reconnus pour le sevrage tabagique.
Cependant, on sait que des fumeurs arrêtent de fumer du tabac grâce aux cigarettes électroniques.
« Les faits nous montrent que de nombreux fumeurs ont réussi à arrêter totalement de fumer des cigarettes en utilisant la e-cigarette. Ils continuent à utiliser la e-cigarette, mais ne fument plus du tout et s’en trouvent très bien. Certains même, ont réussi, au bout d’un certain temps, à se passer également des e-cigarettes.
D’autres fumeurs, ont réussi à diminuer considérablement leur consommation de tabac en utilisant la e-cigarette. Ils gardent encore quelques cigarettes par jour et utilisent la plupart du temps la e-cigarette, avec beaucoup de satisfaction » informe le Dr Le Maître, tout en précisant que « l’objectif doit rester le 0 cigarette».
Une étude en ligne menée sur 222 participants confirme cette observation: 31 % des participants sont devenus abstinents au tabac 6 mois après la première utilisation de cigarettes électroniques, 66,8 % ont déclaré avoir diminué leur consommation, 48,8 % ont arrêté complètement pendant une période. (Siegel et al, 2011).
D’aucuns soulignent que la cigarette électronique entretient la gestuelle du tabac, ce qui serait déconseillé pour réussir à arrêter de fumer. Cependant, il semble que des fumeurs apprécient cette substitution comportementale et arrivent à dissocier la dépendance tabagique et à arrêter de fumer.
Il faudra encore mener de nombreuses études pour savoir si la e-cigarette peut être considéréecomme un traitement efficace de la dépendance tabagique.
La cigarette électronique, une alternative plus saine à la cigarette ?
Des fumeurs utilisent la e-cigarette aujourd’hui pour réduire leur consommation de tabac, en produit de remplacement dans les lieux dans lesquels il est interdit de fumer,voire comme une alternative totale aux cigarettes.
Les « vapoteurs » se tournent vers les cigarettes électroniques car elles leur semblent moins dangereuses que les cigarettes classiques. Et ils disent avoir moins de symptômes respiratoires (toux, essoufflement). »
Les « vapoteurs » exclusifs déclarent tous mieux respirer, confirme le Dr Le Maître.
« Aujourd’hui, on peut dire que la cigarette électronique apparaît comme une alternative infiniment moins dangereuse que la cigarette, même si on manque à ce stade de données d’utilisation à long terme » affirme la tabacologue.
« En France, le tabac tue chaque année plus de 73 000 français et est impliqué dans la genèse de très nombreuses maladies chroniques (diabète, BPCO, insuffisance rénale, maladies cardio-vasculaires etc…)» rappelle-t-elle.
Ce qu’il est important de souligner, c’est que la seule diminution du tabac ne suffit pas à faire baisser les risques pour la santé, cancers et maladies coronariennes, il faut arrêter complètement.
La cigarette électronique peut-elle être un produit d’initiation au tabac chez les jeunes ?
Une des craintes des acteurs de la lutte contre le tabagisme est que les cigarettes électroniques constituent une porte d’entrée dans le tabagisme pour les jeunes.
Jean-François Etter* dans son récent ouvrage sur la cigarette électronique souligne que la présence d’arômes dans les e-cigarettes ( comme la menthe par exemple ) pourrait inciter les jeunes à fumer : « les arômes présents dans les e-liquides et les cigarettes de tabac ont des effets sensoriels qui facilitent l’inhalation de vapeur et de fumée. Cela pourrait accroître la dépendance aux e-cigarettes et au tabac, et faciliter l’utilisation de ces produits par les jeunes et par les femmes ».
« La cigarette électronique, est un produit qui, en effet, peut plaire aux jeunes. C’est nouveau, avec un marketing très bien fait et très inventif. Et c’est une réalité que les jeunes, de 11 ans à 18 ans, ont tous entendu parler de la cigarette électronique » indique Béatrice Le Maître. Cependant, des études récentes montrent que lesjeunes interrogés qui déclaraient avoir déjà, en grande majorité,essayé la cigarette électronique étaient des jeunes quiavaient aussi déjà essayé la cigarette » souligne-t-elle. Il serait souhaitable que les e-cigarettes soient interdites à la vente pour les mineurs.
On redoute aussi, surtout chez l’adolescent, l’envie de provoquer en « vapotant » là où il est interdit defumer. « Il est en effet totalement licite de ne pas encourager les très jeunes à utiliser un produit qui reproduit l’acte de fumer. Les vendeurs de cigarettes électroniques sont d’ailleurs favorables à une interdiction de vente aux moins de 18 ans. Mais, pour autant, l’objectif qui doit rester prioritaire est de mettre en oeuvre un contrôle fort du tabac, pour ralentir l’épidémie dutabagisme chez les jeunes » affirme Béatrice le Maître.
Voilà pourquoi le gouvernement a décidé d’interdire la vente dela cigarette électronique aux mineurs...
La cigarette électronique entraîne-t-elle une dépendance ?
Répondre à cette question est aujourd’hui difficile car on manque d’études scientifiques. L’ANSM** communiquait ainsi en 2011: « Comme pour la cigarette classique, consommer des cigarettes électroniques peut induire une dépendance, pour toute quantité de nicotine contenue dans les cartouches. L’usage de ce produit expose donc les utilisateurs qui n’étaient dépendants ni aux cigarettes, ni à la nicotine, à un risque de dépendance primaire, tout comme il maintient la dépendance à la nicotine chez le fumeur ». En réalité, on ne sait pas vraiment.
C’est effectivement la nicotine qui crée l’addiction aux cigarettes : Le tabac, via la nicotine inhalée avec la fumée de tabac, sous forme gazeuse, est le produitle plus addictif, avec une dépendance qui s’installe très tôt, après l’expérimentation, quand on a les « bons » récepteurs nicotiniques dans le cerveau.
« C’est par voie artérielle, sous forme de « shoot » que le cerveau reçoit « sa » dose de nicotine » explique Béatrice Le Maître.
A l’inverse, la nicotine fournie par les substituts nicotiniques diffuse lentement, par voie veineuse, n’entraîne pas d’effet de dépendance et permet au fumeur de gérer ses symptômes de sevrage. La e-cigarette est également utilisée pour gérer les symptômes de sevrage et les taux plasmatiques ainsi obtenus seraient intermédiaires entre les taux observés après avoir fumé et ceux observés avec les substituts nicotiniques.
De nouvelles études sont nécessaires pour déterminer si la cigarette électronique contenant de la nicotine peut avoir un potentiel addictif, en particulier si elle est utilisée par des jeunes n’ayant jamais fumé.
Pourquoi les cigarettiers investissent-ils autant dans les e-cigarettes ?
Les cigarettiers, face au succès de la e-cigarette, se lancent à l’assaut du marché.
Ainsi, le groupe Altria, fabricant les cigarettes Marlboro, a fait savoir par voie de presse qu’il allait bientôt commercialiser une cigarette électronique. « Les cigarettiers surfent sur le même « segment » de population que les fabricants de cigarettes électroniques et 80 % des fumeurs aimeraient cesser de fumer. On voit que c’est aujourd’hui un marché qui explose et qui se fait aux dépends des ventes de cigarettes et aussi de substituts nicotiniques. L’intérêt des cigarettiers pour le marché des e-cigarettes est donc tout à fait logique » explique le Dr Le Maître.
Cigarette électronique et économie
La cigarette électronique contribue-t-elle au redressement des finances du pays ?
Le tabac coûte cher à la France : 48 Mds d’e par an, soit 3 % de notre PIB ; toute baisse du tabagisme vient donc en diminution de ce fardeau ; mais en diminuant le tabagisme, on diminue aussi les recettes liées au tabac. Nombreux sont les fumeurs qui - de la déclaration même des tabacologues de terrain - ont diminué, voire arrêté leur consommation de tabac depuis qu’ils « vapotent ».
L’explosion du commerce de la cigarette électronique joue-t-elle un rôle dans notre contexte économique ?
Sur le plan purement économique, les bénéfices sont certains :
> pour l’ex-fumeur devenu « vapoteur » dont le pouvoir d’achat amélioré lui permet d’acquérir autre chose : un solde positif pouvant atteindre 2 400 e par an pour une consommation d’un paquet/jour, après déduction du coût de l’utilisation du matériel, variable en fonction de la consommation et du renouvellement des consommables.
Or en France, comme dans tous les pays, plus on est pauvre, plus on fume.
> pour le commerce en général, malgré la crise : on observe le développement extrêmement rapide de chaînes de boutiques spécialisées, créatrices d’emplois variés; peu de petites entreprises peuvent en dire autant.
Une société française produit des arômes de qualité ; elle exporte une grande partie de sa production.
> pour l’entreprise, puisqu’il est établi depuis l’application de la loi Evin que le non-fumeur est plus productif, fait moins de pauses, et des pauses moins longues, est moins souvent arrêté pour maladie que le fumeur.
> pour l’Assurance Maladie, à court terme, par la diminution des arrêts de courte durée à l’occasion des maladies saisonnières, plus sévère schez les fumeurs ; à long terme par celle des maladies chroniques graves liées au tabagisme.
> pour les Finances Publiques, dont les pertes liées aux revenus annuels (environ 15 Mdsd’e) tirés de la vente du tabac pourraient-en dehors des économies liées aux dépenses de santé - être rapidement compensées par des mesures financières adaptées concernant par exemple – outre l’augmentation programmée des taxes - les revenus exceptionnels tirés de la vente des cigarettes électroniques et la suppression des mesures d’accompagnement des buralistes proposée par la Cour des Comptes en décembre 2012.
Seuls seraient perdants les Laboratoires qui vendraient exclusivement des produits d’aide à l’arrêt du tabac.
E-cigarette : historique
C’est un pharmacien chinois, Hon Lik, qui a inventé la cigarette électronique en 2003. Les cigarettes électroniques ont commencé à être vendues en Chine en 2004 par la Golden Dragon Holdings (sous la marque Ruyan qui signifie « comme de la fumée » en mandarin) puis ont été exportées. Elles sont vendues en Europe et aux États-Unis depuis 2006.
Aspects réglementaires en France
La cigarette électronique : produit de consommation courante ou médicament ?
En France, les cigarettes électroniques sont considérées comme des produits de consommation courante. A ce jour, aucune d’entre elles ne dispose d’une AMM (Autorisation de Mise sur leMarché), aucun autre fabricant n’ayant fait une demande dans ce sens. Une société, Visiomed vend depuis avril 2013 en pharmacie une cigarette électronique nommée TagReplay, premier dispositif médical adapté pour le traitement de la gestuelle tabagique. Seule une e-cigarette ayant obtenu une AMM pourrait prétendre au terme sevrage tabagique.
Recommandations groupe d’experts et mesures annoncées par le Ministère de la santé
Le groupe d’experts chargé par la Ministre de la Santé d’élaborer un rapport sur la e-cigarette* a présenté ses avis et a formulé 28 recommandations peu avant la Journée Mondiale sans Tabac du 31 mai 2013. Dans leurs conclusions, les experts rappellent que la priorité est l’arrêt du tabac en raison de sa nocivité et que l’on ne peut négliger de s’intéresser à un produit – la e-cigarette – beaucoup moins toxique et susceptible de contribuer àla réduction des risques pour les fumeurs.
Ils recommandent donc, entre autres :
- de ne pas l’interdire, mais de règlementer le produit, sa distribution et son utilisation, afin que les consommateurs disposent de produits conformes aux codes de la consommation,
- de mettre en oeuvre les mesures nécessaires pourque la e-cigarette ne soit pas une incitation à fumer pour les jeunes,
- d’étendre à la e-cigarette et aux autres produits évoquant le tabac (PET) l’application d’interdiction d’utilisation dans les lieux publics,
- de rendre possible la vente en pharmacie avec le statut de médicament de certaines e-cigarettes (avec tous les contrôles applicables aux médicaments) mais de ne pas en faire le lieu exclusif de vente,
- de poursuivre les recherches concernant les effets de ce nouveau produit d’utilisation courante.
Les déclarations concernant les engagements du gouvernement en matière de lutte contre le tabac faites par madame Marisol Touraine le 31 mai comportaient, entre autres, des mesures sur la e-cigarette recommandées dans ce rapport,notamment :
- interdiction d’utilisation dans les lieux où il est interdit de fumer,
- interdiction de vente aux mineurs,
- interdiction de publicité.
Ces mesures répondent aux inquiétudes et incertitudes concernant la potentielle capacité des e-cigarettes à favoriser le tabagisme, notamment chez les jeunes.
Peut-être faudra-t-il les remettre un jour en question s’il est avéré que la e-cigarette est une véritable alternative au tabac, sans danger pour la santé et n’incite pas à fumer.
En tout état de cause, il est à souhaiter que tous les moyens nécessaires soient mis en oeuvre rapidement par le Ministère pour que les mesures de lutte contre le tabac lui-même, qui existent dans les textes, soient accompagnées des dispositifs nécessaires pour les faire appliquer.
Une étude sur la cigarette électronique à Périgueux : des résultats encourageants !
Étude du Dr Jacques Grangerdu Comité départemental contre les maladies respiratoiresde la Dordogne et du Dr Brigitte Cornette ducentre d’examen de santé CPAM de Périgueux - 2012
« Nous avons réalisé cette étude sur 100 patients, fumeurs depuis plus de 10 ans et qui n’avaient pas l’intention d’arrêter de fumer ( 52 % étaient fumeurs de 20 cigarettes et plus par jour ; 98 % étaient fumeurs de dix cigarettes et plus ; le score de Fagerström était supérieur ou égal à 4 pour 76 % des participants ; pour 30 %, le score était de 7 ou plus).
Nous leur avons proposé d’utiliser des cigarettes électroniques pendant 3 mois.
Les résultats : 26 personnes ont cessé de participer à l’étude car la cigarette électronique ne leur convenait pas, 8 patients ont arrêté de fumer, 45 ont diminué le tabagisme de plus de 50 % et 21 ont diminué le tabagisme de moins de 50 %. On a noté des effets sur la santé de ces patients : rythme cardiaque diminué, taux de monoxyde de carbone expiré diminué ou devenu nul chez ceux ayant arrêté de fumer, capacité vitale forcée améliorée, prise de poids moindre que celle constatée en moyenne en cas de sevrage tabagique, VEMS stable ou qui s’améliore.»
Tout en soulignant les limites de cette expérimentation : « Il est évident que cette observation de l’acceptation de la cigarette électronique a certains défauts : nombre trop limité de participants, pas de double aveugle, hétérogénéité des dispositifs remis, et limitation du choix des parfums » les docteurs Cornette et Granger concluent « On ne peut à la fois connaître que le tabac est la première cause de décès évitables en France et dans le monde, et ne faire aucune étude sur un produit nouveau, plébiscité par des millions d’utilisateurs qui souhaitent connaître davantage sur la cigarette électronique.
L’observation effectuée sur 100 volontaires, permet d’envisager d’autres études plus approfondies, car il y a ungrand nombre de volontaires, et nous n’avons observé sur 3 mois aucun problème significatif, avec au contraire des éléments favorables d’amélioration de santé.»
Perspectives, doutes...Allons plus loin.
La e-cigarette et les jeunes
Il semble très généralement admis que le jeune utilisateur de cigarette électronique est le plus souvent un jeune déjà fumeur ; ce jeune sait déjà qu’il faudra s’arrêter de fumer « un jour » ; il va possiblement constater que dans le fond, en vapotant, ce n’est pas si difficile de diminuer ; c’est donc autant de cigarettes qui ne seront pas fumées ; or vapoter, c’est aussi moins cher ; double bénéfice donc.
Pour le risque d’initiation du jeune non fumeur :
1 - Le Dr Nicole Stenger de Fractal et du Comité contre les Maladies Respiratoires de Loire Atlantique, a assisté au dernier congrès de la Society for Research on Nicotin and Tobacco (SRNT) qui s’est tenu à Boston en mars dernier. A la Question : « la cigarette électronique pourrait-elle constituer une initiation au tabagisme chez les jeunes ? », voici saréponse : on dispose de 4 études qui montrent que chez les étudiants américains comme canadiens, les vapoteurs sont très majoritairement des fumeurs (EU : 47 % des F / 5 % des NF ;canadiens : 32,8 % sont F et 5,9 % sont NF).
Les conclusions : « Aucune étude ne permet pour le moment d’affirmer (ou d’infirmer) que la cigarette électronique conduit les jeunes à devenir fumeurs ».
Cela n’est guère étonnant, pourquoi un jeune non fumeur qui s’amuse à vapoter se mettrait-t-il à fumer du tabac qui coûte beaucoup plus cher, qui rend malade et qui le fait tousser ?
2 - Une référence récente (mai 2013) de Action on Smokingand Health (UK) portant sur 1 400 enfants montre que parmi ceux qui savent ce qu’est une cigarette électronique les seuls utilisateurs sont des fumeurs ; quant au taux chez les non-fumeurs : 1 % a essayé « once or twice » et jamais plus.
L’enquête menée par le Pr Dautzenberg auprès des jeunes parisiens montrant que 8 % des non-fumeurs ont déjà testé la ecigarette, ne dit pas pour autant qu’ils ont fait plus que vapoter une fois ou deux.
Tout cela mérite d’autres confirmations, bien sûr ; par contre, ce qui est probable, c’est qu’il sera extrêmement difficile d’empêcher un jeune de se procurer une cigarette électronique s’il en a envie : un adulte peut refuser d’acheter des cigarettes pour un jeune, mais hésitera probablement beaucoup moins à le faire s’il est lui-même consommateur de cigarette électronique, bien conforté dans le fait sa toxicité est loin d’être démontrée, et qu’il ne voit guère au nom de quoi on interdirait à ce jeune la possibilité de vapoter plutôt que de fumer.
La cigarette électronique pour la femme enceinte
On le sait depuis 2009 (http://cigarette-electronique-recherche.fr/sante/cigarette-et-grossesse/) : il existe « un consensus de l’ANAES* qui confirme que les femmes enceintes qui désirent s’arrêter de fumer peuvent utiliser les traitements nicotiniques de substitution (TNS) lorsque la seule volonté et les aides psychologiques sont insuffisantes ».
La présence éventuelle de nicotine dans les cigarettes électroniques n’est donc plus un problème ; mais les autres produits inhalés, de plus en plus exempts de tous produits réputés « à risque », sont- ils plus malsains pour la mère, comme pour le foetus, que la cigarette qu’elle veut quitter ? On peut en douter !
On ne peut donc guère justifier médicalement le refus de la cigarette électronique ou la déconseiller formellement à une femme enceinte qui dit en tirer bénéfice et ne pouvoir arrêter autrement.
Les risques de l’utilisation à long terme
Pérenniser le geste quant on apprécie la cigarette électronique, c’est évidemment lui donner la vedette et le consolider dans son rôle ; c’est bien là que le conseil d’un professionnel peut être précieux, attention à ne pas conserver cette dimension gestuelle de l’addiction.
Ceci admis, on lit plutôt des témoignages de personnes qui abandonnent lentement leur e-cigarette, en diminuant progressivement le taux de nicotine de leurs produits jusqu’à l’arrêt.
Certains continuent d’ailleurs à vapoter des cigarettes électroniques sans nicotine. Pour les autres (mais combiensont-ils ?) qui continueraient à inhaler de la nicotine, actuellement de qualité de plus en plus « pharmacologique», à des taux réglementés, leur cas évoque celuique connaissent les tabacologues ayant des années depratique, et qui suivent de rares fumeurs qui n’arrivent pas à arrêter leurs produits de substitution nicotinique ; le risque cardio-vasculaire n’est vraiment pas grand ; et s’il arrivait quelque accident , il serait plus la conséquence du tabagisme antérieur qu’attribuable à la nicotine de leur e-cigarette! Quant aux autres constituants, où serait le risque, si les produits vapotés sont de plus en plus contrôlés et validés?
Comment évaluer leur responsabilité réelle, et sur quel critère biologique ou clinique spécifique, s’ils s’améliorent régulièrement ?
Le fameux principe de précaution déjà si souvent malmené aurait là bien du mal à justifier sa position.
On est très loin d’un problème de Santé Publique capable de s’opposer valablement à l’usage de la e-cigarette.
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